Une bataille épique… livrée du fond d’un fauteuil et des affrontements menés du bout des doigts… Les jeux vidéo, du sport vraiment ? « Pour que cela soit du sport, il faut bouger », tranche Soukaïna. « À force de toucher le clavier, on transpire et il faut faire preuve de stratégie », concède Rayan. Alors que sur le parvis, les supporters « ultras » entonnent déjà leurs hymnes au son des tambours, quatre-vingt jeunes, invités du Département, s’apprêtent à découvrir l’envers du décor du plus grand championnat esport français, la LFL – ligue française de League of Legends. D'ordinaire retransmis en streaming, le championnat se décline de temps à autre sous la forme d'un spectacle offline qui n'a rien à envier aux grands matches de ligue 1 de football. Un format baptisé LFL Prixtel qui fait étape pour la première fois en région parisienne, en partenariat avec le Département « L’objectif est d’accompagner la pratique de l’esport, qui prend de l’ampleur, mais aussi de promouvoir auprès des jeunes les bonnes pratiques du sport connecté et du jeu vidéo ainsi que tous les métiers d'avenir qui y sont liés », explique la conseillère départementale Alice Le Moal. En l’occurrence « l’esport ne se résume pas à être devant un écran : il faut de l’esprit d’équipe, une bonne hygiène de vie, de la concentration ! »
Visite en exclusivité
Première découverte en exclusivité pour nos jeunes, la salle VIP où sont choyés les partenaires. « Dans la LFL les retransmissions se font souvent en ligne et sont gratuites, à la différence du football où il y a des droits média importants. Quatre-vingt pour cent des financements viennent donc des partenaires », explique Julien Hubert de Webedia, société qui produit la LFL. Cette salle VIP donne directement en haut de La Grande Seine offrant une vue plongeante sur le plateau, où s'échauffent deux équipes. « Stylé », souffle Rayan, fasciné par les gradins à perte de vue. L’enceinte absorbera sous peu 3 600 spectateurs dont deux groupes de « fans hardcore » - supporters des Vitality.Bee et des Karmine Corp, les triple champions d’Europe. Le moment pour le groupe de se renseigner sur ses chances de croiser dans la salle l'influenceur Inoxtag, l'un des poulains de Webedia. « Il a un programme chargé et ne pourra pas venir », les prévient Julien Hubert.
De l'autre côté de l'écran
Heureusement la Grande Rue, où déambulent des créatures en cosplay comme échappées d’un jeu vidéo, fourmille d’influenceurs et de youtubers. Triomphant, Souleymane se fait même filmer par la chaine "La Crème du Gaming" ! Une fois passé le « village des partenaires », où l’équipe boulonnaise GameWard tient son stand, la visite se poursuit dans les espaces réservés aux joueurs, coaches et à leur entourage en backstage - photographes, community manager.... L'occasion pour les jeunes de croiser le commentateur star d’OTP, Jean Medzadourian - avec ses 150 000 followers. Ou de découvrir la greenroom, dans laquelle les « athlètes » de l'esport peuvent s’échauffer sur de puissantes machines -souris et clavier n'étant pas fournis.« C'est comme dans le foot, à chacun de ramener ses chaussures », compare Roy.
Le parcours se termine à la régie, juste derrière l’écran géant. « Je m’attendais à une salle reculée et à l’écart, s’exclame Shahin. Ce féru d’esport ne pouvait pas rêver meilleure sortie cet été. « J’ai pris l’habitude de suivre les compétitions sur Twitch et sur Youtube. Cette fois il y aura l'ambiance en plus », se réjouit-il. « Les jeunes sont à fond, moi je suis un peu perdu. Mais ils s’amusent et ça nous change du paintball et de la base de loisirs, explique Maxime Dreuil, leur animateur à la Maison de la jeunesse de Clamart. On restera jusqu’à la fin sauf s’ils sont fatigués. » Soit cinq matches d’affilée dans une ambiance survoltée qui les emmèneront, des étoiles plein les yeux, aux alentours de minuit.
Quand l’esport fait son show en salle
La LFL ou ligue française de League of legends, principal championnat esport francophone est habituellement retransmis en direct sur la chaîne gratuite Twitch OTP. « Ligue of Legends est le jeu roi de l’esport, le plus suivi dans le monde entier et la LFL peut être considérée en France comme le championnat de Première division. Il y a un vrai parallèle avec le foot ! », estime Bertrand Amar, responsable esport chez Webedia, producteur de la LFL. Ce format offline ou "LFL Day" a été testé pour la première fois à Aix-en-Provence en 2021 avant Nice et Boulogne-Billancourt. « Les événements physiques, même en e-sport, ont du sens, poursuit le spécialiste. Nous voulions proposer aux dix équipes de LFL le frisson de monter sur scène et permettre aux supporters de les encourager et de se retrouver autour de leur passion ». Ce 21 juillet, la confrontation entre l’équipe locale Gameward et les Lyonnais de LDLC OL s’est soldée par une défaite des Boulonnais. Troisièmes au classement, ils conservent toutefois leurs chances, à deux manches de la fin de la saison estivale, d’accéder aux playoffs et au terme de ceux-ci, aux Europeans Masters, opposant les ligues régionales européennes.
Valoriser les usages pédagogiques du numérique
Cet événement autour de la LFL, auquel auront été invités deux cents jeunes dont quatre-vingt pour une visite des coulisses, s’inscrit dans une stratégie départementale de valorisation des usages pédagogiques du numérique. Avant le LFL Prixtel Day, l’un des temps forts aura été cette année le premier festival de jeu vidéo et du numérique à Nanterre. Dans la continuité de ces deux événements, à la rentrée, des vidéos de sensibilisation portées par des joueurs professionnels seront diffusées dans les collèges pour prévenir les comportements addictifs. Une conférence sera aussi organisée sur les métiers de l’esport, un secteur d’avenir : équipes, organisateurs de compétition, production audiovisuelle…