Majestueuse autant que mystérieuse, sa silhouette gracile vient mêler sa voix aux autres géants du voisinage, rougeâtres érables champêtres et pins noirs. « Ce que donne à voir cette Verticale, c’est une consécration, une manière de prendre la pleine mesure de l’œuvre de Jacques Zwobada », explique Yasmina Filali, petite fille du sculpteur « à l’âme slave, tourmentée, déchirée. »
Commande du Département, La Verticale tient une place unique dans l’héritage du dessinateur et sculpteur, né en 1900 à Neuilly-sur-Seine. Dans une quête obsessive de la perfection, l’artiste réalisa plusieurs versions de cette œuvre-mausolée, « ultime prière » envoyée à Antonia, sa femme et modèle absolu, qui le laissa inconsolable après sa soudaine disparition, en 1956.
Démocratiser la culture
Comme un tiraillement existentiel, jalon puissant de son parcours artistique marqué après-guerre par l’abstraction lyrique, l’œuvre incarne un amour intellectualisé, d’abord sublimé par ses dessins, puis par le plâtre que le maître façonna dans son atelier fontenaisien. Son implantation, nichée à proximité du théâtre Nanterre-Amandiers, semblait l’attendre de pied ferme, sur un croissant de terre engazonné et aujourd’hui transformé en un belvédère à 360°, au sud-ouest du parc départemental de Nanterre.
« Cette œuvre ne pouvait rêver meilleure implantation, souligne le président du Département Georges Siffredi. Grand artisan de l’exception culturelle française, André-Malraux a œuvré, comme le Département s’y attache aujourd’hui, à démocratiser l’accès à la culture à tous les publics. »
Un défi technique
Plus de deux ans d’un chantier pharaonique, confié à la Fonderie de Coubertin (Yvelines), auront été nécessaires pour façonner ce dernier-né de la collection d’œuvres monumentales de plein air du territoire (voir encadré). « Ce fut un défi technique, du début à la fin, se souvient Christophe Berry, directeur de la fonderie. Ce fut une œuvre résolument complexe, notamment à couler.Mais en s’inspirant de toutes les œuvres de l'artiste que l’on a jadis réalisées, nous avons pu reproduire cette sculpture, agrandie à dix mètres, en donnant l’illusion qu’elle fut sculptée dès l’origine dans ces dimensions. »
Jouant des variations de lumière et de ses miroitements à la surface de l’eau, La Verticale produit des effets sans cesse renouvelés, sur chacune de ses facettes, qui s’étrécissent à mesure qu’elles rejoignent le ciel. « Jacques Zwobada était un homme fasciné par la mort, explique Bernard Vasseur, auteur d’un ouvrage sur le sculpteur. Il considérait que l’art devait mener vers le ciel, l'art comme seule manière pour les humains de dépasser la finitude de l’existence humaine... »
Les Hauts-de-Seine, un musée à ciel ouvert
La Verticale est la dernière venue des créations monumentales jalonnant la Vallée de la Culture, qui compte notamment la Tour aux figures de Jean Dubuffet, sur Île Saint-Germain, mais aussi La Défense d’Auguste Rodin (La Seine Musicale) et plus récente encore, Ether (Égalité), œuvre de Kowei Nawa qui trône en figure de proue de l’île Seguin. « L’installation de ces œuvres monumentales illustre l’engagement constant du Département en vue de renforcer la place des arts dans l’espace public, explique M. Georges Siffredi. Si notre Département a choisi de faire du territoire un musée à ciel ouvert, c’est parce que ces œuvres donnent vie à l’espace public, le façonne et permettent de le redécouvrir. »