L’effort est intense, court, et surtout ludique. Dans un joyeux vacarme les enfants retournent les cartes disposées à l’envers sur le tapis du gymnase pour découvrir et exécuter les figures de crossfit prescrites : vingt secondes de déplacement en canard, quinze sauts de lapin, dix ponts sur les fesses… « Ce groupe présente des troubles de l’apprentissage, précise Michaël Mathieu, responsable de l’animation sportive les mercredis, par ailleurs professeur d’EPS. Nous leur présentons d’abord les cartes avec les images puis ensuite la consigne écrite seule qu’ils peuvent alors plus facilement mémoriser. » Pendant ce temps les « maternelles », atteints de paralysie cérébrale, confectionnent un gâteau à la banane tandis que leurs aînés peaufinent des cartes géantes « loup garou » qui orneront les murs…
La porte de la salle Snoezelen, d’où filtrent lumière tamisée et musique classique, est ouverte à ceux qui auraient besoin de se détendre ou en cas de crise (malaise, épilepsie…). « Les stimulations sensorielles sont visuelles, grâce aux jeux de lumière, olfactives, musicales et tactiles. Le matelas permet aux enfants en fauteuil d’avoir des sensations nouvelles notamment au niveau de l’oreille interne », explique Agathe Roussel, psychomotricienne hospitalière. Journée d’animation ordinaire dans une structure qui l’est beaucoup moins…
Unique en France
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À deux pas de l’hôpital, Aquarelles accueille environ quatre-vingt petits patients atteints de troubles moteurs ou du neurodéveloppement pour des activités éducatives et de loisirs adaptées qui concourent à leur bien-être et leur autonomie jour après jour. Ses activités sont imbriquées avec celles de l’établissement régional d’enseignement adapté (EREA) Jacques-Brel dont elle partage les locaux. « Ces enfants ont été orientés en hôpital de jour parce qu’ils ne pouvaient pas être rééduqués en ville avec cette intensité. À l’hôpital, entre les temps de rééducation (kinésithérapie, ergothérapie, orthophonie…Ndlr) ils suivent une scolarité adaptée à leurs besoins particuliers et se rendent à l’accueil de loisirs les mercredis et pendant les vacances scolaires. C’est une façon d’assurer la continuité des prises en charge tout au long de la semaine », explique Élise Vien, directrice de EREA Jacques-Brel et d’Aquarelles. Un autre mode d’intervention voit les animateurs « monter » en réanimation pédiatrique pour tenir compagnie aux enfants en hospitalisation complète, restés seuls le week-end et pendant les vacances scolaires.
Unique en France, la structure fonctionne grâce à un partenariat associant le Département, l’association gestionnaire des Pupilles de l’Enseignement Public des Hauts-de-Seine, l’Éducation nationale, l’Assistance publique des hôpitaux de Paris et la Région. Le Département a financé le volet loisirs de l’EREA dès 1993 et Aquarelles dès sa création en 2008 soit 300 000 euros par an. « Les enfants ont l’air heureux et ne pensent pas à leur maladie, non seulement ils s’évadent mais ils progressent aussi sur le plan éducatif, se félicite Georges Siffredi, qui visitait le site à l’occasion des 20 ans de la loi handicap. Dès l’origine, le Département a souhaité soutenir ce projet qui a, depuis, fait ces preuves et qui est porteur de sens. Il faudrait d’autres expérimentations de ce type en France. »
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La loi handicap, 20 ans après
La compensation du handicap, par des allocations dédiées, et l’obligation d’accessibilité de la chaine des déplacements sont les deux piliers de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. La loi définit quatre familles de handicap : mental, sensoriel, cognitif et psychique et prend en compte les personnes à mobilité réduite y compris de manière temporaire. Elle instaure la Maison départementale des personnes handicapées, guichet unique chargé de l’accueil et l’accompagnement de ce public. Comme le montre ce projet Aquarelles, le Département, au-delà de ses compétences obligatoires, porte de nombreuses actions culturelles, éducatives et sportives en faveur de l’inclusion.