Le porté de micro est encore un peu hésitant et la timidité transparaît dans leur voix. Un par un, les apprentis rappeurs s’avancent sur le devant de la scène, encouragés par Yoshi Di Original qui les a accompagnés pendant ce stage de cinq jours. Beaucoup se produisent pour la première fois en public. « Allez, on ne se met pas la pression, n’ayez jamais peur d’essayer, c’est mieux que de ne rien faire », encourage l’artiste qui, juste avant ce passage, a organisé un atelier de beatboxing« pour leur donner des bases rythmiques ». Afin d’accompagner leurs textes, ces jeunes âgés de 12 à 16 ans ont eux-mêmes composé des boucles aux résonnances trap, guidés par Ryadh, chanteur et compositeur. « On essaie de partir de ce qu’ils aiment pour le reproduire en mieux. Ils sont bluffés de voir que ça n’a rien à envier à ce que l’on peut entendre à la radio ».
Danse africaine, concours de cuisine… En ce début de vacances d’été, à l’espace Marc-Lanvin de Bagneux des activités en tous genre se côtoient. Si la majorité sont organisées par la municipalité, ce stage à tonalité hip-hop a lieu à l’initiative du Département, dans le cadre de son« Plan vacances Jeunes été 2020» qui comprend de nombreuses activités gratuites, sportives, solidaires ou culturelles. « Compte tenu du confinement que ces jeunes avaient vécu pendant deux mois ce n’est pas un été comme les autres, ils sont plus nombreux à rester à la maison, explique Nathalie Léandri, vice-présidente du Département en charge des affaires et constructions scolaires. En plus des actions existantes sur le territoire, départementales ou locales, nous avons donc voulu proposer des activités inédites qui viennent étoffer l’offre ». À l’automne, ce plan estival sera prolongé par un plan jeunesse, en cours de réflexion.
Combattre les clichés
Déjà intervenue auprès des jeunes dans le cadre du dispositif départemental « Eteignez vos portables », l’association Les Portes de l’Exil, spécialisée dans la promotion des musiques actuelles, du hip hop au jazz, met en place ce stage sur plusieurs points du territoire. « L’objectif n’est pas de créer des stars mais plutôt d’utiliser la création hip hop pour rompre avec leur angoisse de la page blanche », explique Francis-Gaël Grommier, son directeur qui a fait appel à deux intervenants « déjà bien référencés dans leur domaine ». Demi-finaliste de The Voice cette année Ryadh est passé maître dans l’emploi de logiciels de musique assistée par ordinateur. Quant à Yoshi Di Original, champion d'improvisation hip-hop, il s’est fait un nom dans la scène française depuis de nombreuses années. « J’essaie de transmettre ma passion et ma vision sans l’imposer, car nous n’avons pas forcément les mêmes références, je suis habitué à rapper sur un beat plus rapide que le trap ». Sur l’écriture, l’objectif de cet amateur de rap à l’ancienne, et de groupes comme Fabe ou IAM, a été « de les faire s’écarter de la routine. Le quartier, la police, la drogue, ce n’est pas leur vrai univers. Surtout à 12 ans ! Il ne faut pas qu’ils s’enferment dans le cliché du jeune de cité ». Si la route est encore longue jusqu’au studio, à l’issue du stage plusieurs jeunes ont gardé contact avec leurs mentors. Pour continuer à tracer leur propre voix.